Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/414

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Scène V.

Ægée, Médée.


Ægée.

Mais d’où vient ce bruit sourd ? quelle pâle lumière
Dissipe ces horreurs et frappe ma paupière ?
Mortel, qui que tu sois, détourne ici tes pas,
Et de grâce m’apprends l’arrêt de mon trépas,
L’heure, le lieu, le genre ; et si ton cœur sensible
À la compassion peut se rendre accessible,
Donne-moi les moyens d’un généreux effort
Qui des mains des bourreaux affranchisse ma mort.

Médée.

Je viens l’en affranchir. Ne craignez plus, grand prince ;
Ne pensez qu’à revoir votre chère province ;
(Elle donne un coup de baguette sur la porte de la prison, qui s’ouvre aussitôt ; et en ayant tiré Ægée, elle en donne encore un sur ses fers, qui tombent.)
Ni grilles ni verrous ne tiennent contre moi.
Cessez, indignes fers, de captiver un roi ;
Est-ce à vous à presser les bras d’un tel monarque ?
Et vous, reconnaissez Médée à cette marque,
Et fuyez un tyran dont le forcènement
Joindrait votre supplice à mon bannissement ;
Avec la liberté reprenez le courage.

Ægée.

Je les reprends tous deux pour vous en faire hommage,
Princesse, de qui l’art propice aux malheureux
Oppose un tel miracle à mon sort rigoureux ;
Disposez de ma vie, et du sceptre d’Athènes ;