J’attire en me vengeant sa haine et sa colère[1] ;
J’attire ses mépris en ne me vengeant pas.
À mon plus doux espoir l’un me rend infidèle,
Et l’autre indigne d’elle.
Mon mal augmente à le vouloir guérir ;
Tout redouble ma peine.
Allons, mon âme ; et puisqu’il faut mourir,
Mourons du moins sans offenser Chimène.
Mourir sans tirer ma raison !
Rechercher un trépas si mortel à ma gloire !
Endurer que l’Espagne impute à ma mémoire
D’avoir mal soutenu l’honneur de ma maison !
Respecter un amour dont mon âme égarée
Voit la perte assurée !
N’écoutons plus ce penser suborneur,
Qui ne sert qu’à ma peine.
Allons, mon bras, sauvons du moins l’honneur[2],
Puisqu’après tout il faut perdre Chimène.
Oui, mon esprit s’étoit déçu[3].
Je dois tout à mon père avant qu’à ma maîtresse[4] :
Que je meure au combat, ou meure de tristesse,
- ↑
Var. Qui venge cet affront irrite sa colère,
Et qui peut le souffrir ne la mérite pas (a).
Prévenons la douleur d’avoir failli contre elle,
Qui nous seroit mortelle.
Tout m’est fatal, rien ne me peut guérir,
Ni soulager ma peine. (1637-56)
(a) Et qui peut la souffrir ne la mérite pas. (1637 in-12 et 38)
— L’édition de 1644 in-12 porte : « ne le mérite pas, » au lieu de : « ne la mérite pas. » - ↑ Var. Allons, mon bras, du moins sauvons l’honneur,
Puisqu’aussi bien il faut perdre Chimène. (1637-56) - ↑ L’édition de 1637 in-12 porte par erreur : « Oui, mon esprit est déçu. »
- ↑ Var. Dois-je pas à mon père avant qu’à ma maîtresse ? (1637-48)
Var. Dois-je pas à mon père autant qu’à ma maîtresse ? (1652-56)