Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 3.djvu/331

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On l’entend d’autant moins que plus on croit l’entendre[1] ;
Et loin de s’assurer sur un pareil arrêt,
Qui n’y voit rien d’obscur doit croire que tout l’est.

SABINE.

Sur ce qui fait pour nous prenons plus d’assurance,
Et souffrons les douceurs d’une juste espérance.
Quand la faveur du ciel ouvre à demi ses bras,
Qui ne s’en promet rien ne la mérite pas ;
Il empêche souvent qu’elle ne se déploie,
Et lorsqu’elle descend, son refus la renvoie.

CAMILLE.

Le ciel agit sans nous en ces événements,
Et ne les règle point dessus nos sentiments.

JULIE.

Il ne vous a fait peur que pour vous faire grâce.
Adieu : je vais savoir comme enfin tout se passe.
Modérez vos frayeurs ; j’espère à mon retour
Ne vous entretenir que de propos d’amour,
Et que nous n’emploierons la fin de la journée
Qu’aux doux préparatifs d’un heureux hyménée.

SABINE.

J’ose encor l’espérer[2].

CAMILLE.

J’ose encor l’espérer[2].Moi, je n’espère rien.

JULIE.

L’effet vous fera voir que nous en jugeons bien.

  1. On lit dans Psyché (acte II, scène iii) :

    Un oracle jamais n’est sans obscurité :
    ---...On l’entend d’autant moins que mieux on croit l’entendre.

  2. Var. Comme vous je l’espère. cam. Et je n’ose y songer.
    ----jul. L’effet nous fera voir qui sait mieux en juger. (1641-56)