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ACTE IV.


Scène première.

LE VIEIL HORACE, CAMILLE.
LE VIEIL HORACE.

Ne me parlez jamais en faveur d’un infâme ;
Qu’il me fuie à l’égal des frères de sa femme :
Pour conserver un sang qu’il tient si précieux,
Il n’a rien fait encor s’il n’évite mes yeux.
Sabine y peut mettre ordre, ou derechef j’atteste
Le souverain pouvoir de la troupe céleste…

CAMILLE.

Ah ! mon père, prenez un plus doux sentiment[1] ;
Vous verrez Rome même en user autrement ;
Et de quelque malheur que le ciel l’ait comblée,
Excuser la vertu sous le nombre accablée.

LE VIEIL HORACE.

Le jugement de Rome est peu pour mon regard,
Camille ; je suis père, et j’ai mes droits à part.
Je sais trop comme agit la vertu véritable :
C’est sans en triompher que le nombre l’accable ;
Et sa mâle vigueur, toujours en même point,
Succombe sous la force, et ne lui cède point.
Taisez-vous, et sachons ce que nous veut Valère.

  1. Var. Eh ! mon père, prenez un plus doux sentiment. (1641-48 et 55 A.)