Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 3.djvu/55

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mais d’ailleurs craignant que des tacites menaces que vous lui faites, vous ou quelques-uns de vos amis n’en viennent aux effets, qui tireroient des suites ruineuses à l’un et à l’autre, elle m’a commandé de vous écrire que si vous voulez avoir la continuation de ses bonnes grâces, vous mettiez toutes vos injures sous le pied, et ne vous souveniez plus que de votre ancienne amitié, que j’ai charge de renouveler sur la table de ma chambre à Paris, quand vous serez tous rassemblés. Jusqu’ici j’ai parlé par la bouche de Son Éminence ; mais pour vous dire ingénument ce que je pense de toutes vos procédures, j’estime que vous avez suffisamment puni le pauvre M. Corneille de ses vanités et que ses foibles défenses ne demandoient pas des armes si fortes et si pénétrantes que les vôtres. Vous verrez un de ces jours son Cid assez malmené par les sentiments de l’Académie ; l’impression en est déjà bien avancée, et si vous ne venez à Paris dans ce mois, je vous l’envoirai. Cependant conservez-moi, s’il vous plaît, quelque place dans le souvenir de M. de Belin ; faites-moi de plus l’honneur de lui témoigner que je prends grande part à son affliction, et que je suis autant touché que pas un de ses serviteurs, de la perte qu’il a fait[1]. Si j’avois l’esprit assez libre, je la lui témoignerois à lui-même ; mais je me console quand je pense que ma douleur sera plus éloquente en votre bouche qu’en la mienne, et que vous n’oublierez rien pour témoigner les véritables sentiments de celui qui est avec passion,

« Monsieur,
« Votre très-humble et très-fidèle serviteur
« Boisrobert. »


Depuis le jour où le Cardinal eut ainsi fait connaître ses intentions, on ne publia plus rien que les remercîments adressés par Scudéry à l’Académie. Ils parurent dans un petit recueil portant le titre suivant : Lettre de Mr de Balzac à Mr de Scudery, sur ses Obseruations du Cid. Et la response de Mr de Scudery à Mr de Balzac. Auec la lettre de Mr de Scudery à

  1. Il y a fait, et non faite, dans l’édition originale. Voyez des exemples analogues dans la prose de Malherbe, tome II de l’édition de M. Lalanne, p. 436, 442, 576, etc.