Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 3.djvu/70

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de violence et d’animosité la diminution du crédit qu’il avoit acquis ; et si vous eussiez eu assez de pouvoir, vous eussiez terni la gloire d’un homme duquel vous avez autrefois recherché l’amitié, et de laquelle il vous avoit honoré : vous ne la méritiez pas, puisque vous prenez si peu de soin à la conserver.

Au reste, je vous veux avertir encore une fois d’un point qui ne vous sera pas inutile, Monsieur l’auteur, c’est de vous défaire de vos comparaisons, lesquelles paroissent fort souvent dans votre lettre, et choquent beaucoup de personnes. Vous êtes jeune, il y a espérance que vous vous guérirez de vos erreurs, et direz un jour que je n’ai pas peu contribué à votre avancement. Adieu, beau corps plein de plaies[1], et si tu veux savoir mon nom, je ne fus jamais renégat. Adieu, console-toi.

martialis (Epigr. lib. IX, épigr. 82)[2].
Lector et auditor nostros probat, Aule, libellos ;
Sed quidam exactes esse poeta negat :
Non nimium euro, nam cœnæ fercula nostræ
Malim convivis quam placuisse coquis.


traduction, à monsieur corneille


Les vers de ce grand Cid, que tout le monde admire,
Charmants à les entendre, et charmants à les lire[3],
Un poëte seulement les trouve irréguliers,
Corneille, moque-toi de sa jalouse envie :
Quand le festin agrée à ceux que l’on convie,

Il importe fort peu qu’il plaise aux cuisiniers.
  1. Allusion à ce passage de la Lettre àsous le nom d’Ariste (p. 4) : « Eucore qu’il (Scudéry) ait remarqué huit cents plaies sur ce beau corps, je trouve toutefois qu’il en a négligé pour le moins huit cents autres qui méritoient bien d’être sondées. »
  2. Cette épigramme et sa traduction, ainsi que la réponse qui vient après, ont été imprimées, dans l’édition originale, à la suite de la Lettre précédente.
  3. À la suite de la Lettre apologitique (voyez ci-dessus, p. 24, note 2), ce vers est un peu différent :

    Et charmants à les voir, et charmants à les lire.