Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/298

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notre peinture parlante : quand le crime est bien peint de ses couleurs, quand les imperfections sont bien figurées, il n’est point besoin d’en faire voir un mauvais succès à la fin pour avertir qu’il ne les faut pas imiter ; et je m’assure que toutes les fois que le Menteur a été représenté, bien qu’on l’ait vu sortir du théâtre pour aller épouser l’objet de ses derniers desirs, il n’y a eu personne qui se soit proposé son exemple pour acquérir une maîtresse, et qui n’ait pris toutes ses fourbes, quoique heureuses, pour des friponneries d’écolier, dont il faut qu’on se corrige avec soin, si l’on veut passer pour honnête homme. Je vous dirois qu’il y a encore une autre utilité propre à la tragédie, qui est la purgation des passions ; mais ce n’est pas ici le lieu d’en parler, puisque ce n’est qu’une comédie que je vous présente. Vous y pourrez rencontrer en quelques endroits ces deux sortes d’utilité dont je vous viens d’entretenir. Je voudrois que le peuple y eût trouvé autant d’agréable, afin que je vous pusse présenter quelque chose qui eût mieux atteint le but de l’art. Telle qu’elle est, je vous la donne, aussi bien que la première, et demeure de tout mon cœur,

MONSIEUR,
Votre très-humble serviteur,
Corneille.