Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/347

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CLITON.

Croyez qu’à le trouver vous auriez de la peine[1] :
Le monde n’en voit pas quatorze à la douzaine ;
825Et je jurerois bien, Monsieur, en bonne foi,
Qu’en France il n’en est point que Jodelet et moi.

DORANTE.

Voilà de ses bons mots les galantes surprises[2] ;
Mais qui parle beaucoup dit beaucoup de sottises ;
Et quand il a dessein de se mettre en crédit,
830Plus il y fait d’effort, moins il sait ce qu’il dit.

CLITON.

On appelle cela des vers à ma louange.

CLÉANDRE.

Presque insensiblement nous avons pris le change.
Mais revenons, Monsieur, à ce que je vous dois.

DORANTE.

Nous en pourrons parler encore quelque autre fois :
Il suffit pour ce coup.

CLÉANDRE.

835Il suffit pour ce coup.Je ne saurois vous taire
En quel heureux état se trouve votre affaire.
Vous sortirez bientôt, et peut-être demain ;
Mais un si prompt secours ne vient pas de ma main ;
Les amis de Philiste en ont trouvé la voie ;
840J’en dois rougir de honte au milieu de ma joie ;
Et je ne saurois voir sans être un peu jaloux
Qu’il m’ôte les moyens de m’employer pour vous[3].
Je cède avec regret à cet ami fidèle :
S’il a plus de pouvoir, il n’a pas plus de zèle ;
845Et vous m’obligerez, au sortir de prison,
De me faire l’honneur de prendre ma maison.

  1. Var. Croyez qu’à le trouver vous auriez grande peine. (1645-68)
  2. Var. Voilà de ses bons mots les grâces plus exquises. (1645-56)
  3. Var. Qu’il m’ôte les moyens de rien faire pour vous. (1645-56)