[1].
Tonne, tonne à ton gré, fais peur de ta justice :
C’est à moi d’apaiser Rome par ton supplice ;
C’est à moi de punir ta cruelle douceur,
Qui n’épargne en un roi que le sang de sa sœur.
Je n’abandonne plus ma vie et ma puissance[2]
Au hasard de sa haine ou de ton inconstance ;
Ne crois pas que jamais tu puisses à ce prix[3]
Récompenser sa flamme ou punir ses mépris :
J’emploierai contre toi de plus nobles maximes.
Tu m’as prescrit tantôt de choisir des victimes,
De bien penser au choix[4] ; j’obéis, et je voi
Que je n’en puis choisir de plus dignes[5] que toi,
Ni dont le sang offert, la fumée et la cendre
Puissent mieux satisfaire aux mânes de ton gendre.
Mais ce n’est pas assez, amis, de s’irriter :
Il faut voir quels moyens on a d’exécuter ;
Toute cette chaleur est peut-être inutile ;
Les soldats du tyran sont maîtres de la ville ;
Que pouvons-nous contre eux ? et pour les prévenir,
Quel temps devons-nous prendre, et quel ordre tenir ?
Nous pouvons tout, Seigneur, en l’état où nous sommes[6].
À deux milles d’ici vous avez six mille hommes,
Que depuis quelque jours, craignant des remuements,
Je faisois tenir prêts à tous événements.
Quelques soins qu’ait César, sa prudence est déçue.
Cette ville a sous terre une secrète issue,
- ↑ Var. Que ton cœur est sensible, et qu’on le peut percer. (1644-56)
- ↑ Var. Et n’abandonner pas ma vie et ma puissance. (1644-56)
- ↑ Var. Ni souffrir que demain tu puisses à ce prix. (1644-56)
- ↑ L’édition de 1682 porte seule : « aux choix, » au pluriel.
- ↑ On lit digne, au singulier, dans l’édition de 1656.
- ↑ Var. Nous pouvons beaucoup, Sire, en l’état où nous sommes. (1644-63)