Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/208

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Mais purgez sa vertu des crimes de son père,
Et donnez à mes feux pour légitime objet
Dans le fils du tyran votre premier sujet.

Martian

Vous le voyez, j’y cours. Mais enfin s’il arrive
Que l’issue en devienne ou funeste ou tardive,
Votre perte est jurée, et d’ailleurs nos amis
Au tyran immolé voudront joindre ce fils.
Sauvez d’un tel péril et sa vie et la vôtre ;
Par cet heureux hymen conservez l’un et l’autre,
Garantissez ma sœur des fureurs de Phocas,
Et mon ami de suivre un tel père au trépas.
Faites qu’en ce grand jour la troupe d’Exupère
Dans un sang odieux respecte mon beau-frère,
Et donnez au tyran, qui n’en pourra jouir,
Quelques moments de joie afin de l’éblouir.

Pulchérie

Mais durant ces moments, unie à sa famille,
Il deviendra mon père, et je serai sa fille,
Je lui devrai respect, amour, fidélité,
Ma haine n’aura plus d’impétuosité,
Et tous mes vœux pour vous seront mols et timides
Quand mes vœux contre lui seront des parricides.
Outre que le succès est encore à douter,
Que l’on peut vous trahir, qu’il peut vous résister,
Si vous y succombez, pourrai-je me dédire
D’avoir porté chez lui les titres de l’empire ?
Ah ! Combien ces moments, de quoi vous me flattez,
Alors pour mon supplice auraient d’éternités !
Votre haine voit peu l’erreur de sa tendresse :