Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/213

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Martian, à Pulchérie.

Adieu, Madame, adieu, je n’ai pu davantage.
Ma mort vous va laisser encor dans l’esclavage ;
Le ciel par d’autres mains vous en daigne affranchir !



Scène III


Phocas, Pulchérie, Exupère, Amyntas


Phocas

Et toi, n’espère pas désormais me fléchir :
Je tiens Héraclius, et n’ai plus rien à craindre,
Plus lieu de te flatter, plus lieu de me contraindre ;
Ce frère et ton espoir vont entrer au cercueil,
Et j’abattrai d’un coup sa tête et ton orgueil.
Mais ne te contrains point dans ces rudes alarmes :
Laisse aller tes soupirs, laisse couler tes larmes.

Pulchérie

Moi, pleurer ! Moi, gémir, tyran ! J’aurais pleuré
Si quelques lâchetés l’avaient déshonoré,
S’il n’eût pas emporté sa gloire tout entière,
S’il m’avait fait rougir par la moindre prière,
Si quelque infâme espoir qu’on lui dût pardonner
Eût mérité la mort que tu lui vas donner.
Sa vertu jusqu’au bout ne s’est point démentie ;
Il n’a point pris le ciel ni le sort à partie,
Point querellé le bras qui fait ces lâches coups,
Point daigné contre lui perdre un juste courroux.
Sans te nommer ingrat, sans trop le nommer traître,
De tous deux, de soi-même il s’est montré le maître,
Et dans cette surprise il a bien su courir