Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/248

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Pulchérie

Un généreux conseil est un puissant secours.

Martian

Il n’est point de conseil qui vous soit salutaire
Que d’épouser le fils pour éviter le père :
L’horreur d’un mal plus grand vous y doit disposer.

Pulchérie

Qui me le montrera, si je veux l’épouser ?
Et dans cet hyménée, à ma gloire funeste,
Qui me garantira des périls de l’inceste ?

Martian

Je le vois trop à craindre et pour vous et pour nous.
Mais, Madame ; on peut prendre un vain titre d’époux,
Abuser du tyran la rage forcenée,
Et vivre en frère et sœur sous un feint hyménée.

Pulchérie

Feindre et nous abaisser à cette lâcheté !

Héraclius

Pour tromper un tyran, c’est générosité,
Et c’est mettre, en faveur d’un frère qu’il vous donne,
Deux ennemis secrets auprès de sa personne,
Qui, dans leur juste haine animés et constants,
Sur l’ennemi commun sauront prendre leur temps,
Et terminer bientôt la feinte avec sa vie.

Pulchérie

Pour conserver vos jours et fuir mon infamie,
Feignons, vous le voulez, et j’y résiste en vain.
Sus donc, qui de vous deux me prêtera la main ?
Qui veut feindre avec moi ? Qui sera mon complice ?

Héraclius

Vous, Prince, à qui le ciel inspire l’artifice.

Martian

Vous, que veut le tyran pour fils obstinément.