Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/463

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DONA ELVIRE

Vous pouvez donc m’aimer, et d’une âme bien saine
Entreprendre un combat pour acquérir la reine !
Quel astre agit sur vous avec tant de rigueur,
Qu’il force votre bras à trahir votre cœur ?
L’honneur, me dites-vous, vers l’amour vous excuse.
Ou cet honneur se trompe, ou cet amour s’abuse ;
Et je ne comprends point, dans un si mauvais tour,
Ni quel est cet honneur, ni quel est cet amour.
Tout l’honneur d’un amant, c’est d’être amant fidèle :
Si vous m’aimez encore, que prétendez-vous d’elle ?
Et si vous l’acquérez, que voulez-vous de moi ?
Aurez-vous droit alors de lui manquer de foi ?
La mépriserez-vous quand vous l’aurez acquise ?

DOM ALVAR

Qu’étant né son sujet jamais je la méprise !

DONA ELVIRE

Que me voulez-vous donc ? Vaincu par Dom Carlos,
Aurez-vous quelque grâce à troubler mon repos ?
En serez-vous plus digne ? Et par cette victoire,
Répandra-t-il sur vous un rayon de sa gloire ?

DOM ALVAR

Que j’ose présenter ma défaite à vos yeux !

DONA ELVIRE