Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/554

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Prince, vous abusez trop tôt de ma bonté.
Le rang d’ambassadeur doit être respecté :
Et l’honneur souverain qu’ici je vous défère…

Nicomède. Ou laissez-moi parler, sire, bu faites-moi taire ;
Je ne sais point répondre autrement pour un roi
A qui dessus son trône on veut faire la loi.

Prusias. Vous m’offensez moi-même en parlant de la sorte ;
Et vous devez dompter l’ardeur qui vous emporte.

Nicomède. Quoi ! je verrai, seigneur, qu’on borne vos Etats,
Qu’au milieu de ma course on m’arrête le bras,
Que e vous menacer on ait même l’audace,
Et je ne rendrai point menace pour menace !
Et je remercierai qui me dit hautement
Qu’il ne m’est plus permis de vaincre impunément !

Prusias à Flaminius. Seigneur, vous pardonnez aux chaleurs de son âge :
Le temps et la raison pourront le rendre sage.

Nicomède. La raison et le temps m’ouvrent assez les yeux,
Et l’âge ne fera que me les ouvrir mieux.
Si j’avais jusqu’ici vécu comme ce frère
Avec une vertu qui fût imaginaire
(Car je l’appelle ainsi quand elle est sans effets ;
Et l’admiration de tant d’hommes parfaits
Dont il a vu dans Rome éclater le mérite