Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/555

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N’est pas grande Vertu si l’on ne les imite) :
Si j’avais donc vécu dans ce même repos
Qu’il a vécu dans Rome auprès de ses héros,
Elle me laisserait la Bithynie entière
Telle que de tout temps l’aîné la tient d’un père,
Et s’empresserait moins à le faire régner,
Si vos armes sous moi n’avaient su rien gagner :
Mais parce qu’elle voit avec la Bithynie
Par trois sceptres conquis trop de puissance unie,
Il faut la diviser ; et, dans ce beau projet,
Ce prince est trop bien né pour vivre mon sujet !
Puisqu’il peut la servir à me faire descendre,
Il a plus de vertu que n’en eut Alexandre ;
Et je lui dois quitter, pour le mettre en mon rang,
Le bien de mes aïeux ou le prix de mon sang.
Grâces aux immortels, l’effort de mon courage
Et ma grandeur future ont mis Rome en ombrage :
Vous pouvez l’en guérir, seigneur, et promptement ;
Mais n’exigez d’un fils aucun consentement :
Le maître qui prit soin d’instruire ma jeunesse
Ne m’a jamais appris à faire une bassesse.

Flaminius. À ce que je puis voir, vous avez combattu,
Prince, par intérêt plutôt que par vertu.
Les plus rares exploits que vous ayez pu faire
N’ont jeté qu’un dépôt sur la terre d’un père ;
Il n’est que gardien de leur illustre prix ;
Et ce n’est que pour vous que vous avez conquis,
Puisque cette grandeur à son trône attachée
Sur nul autre que vous ne peut être épanchée.