Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/568

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Je l’épargnais assez pour ne découvrir pas
Les infâmes projets de ses assassinats ;
Mais enfin on m’y force, et tout son crime éclate.
Et, vivant sons remords, marche sans défiance.
J’ai fait entendre au roi Zenon et Métrobate,
Et, comme leur rapport a de quoi l’étonner,
Lui-même il prend le soin de les examiner.

Laodice. Je ne sais pas, seigneur, quelle en sera la suite ;
Mais je ne comprends point toute cette conduite,
Ni comme à cet éclat la reine vous contraint.
Plus elle vous doit craindre, et moins elle vous craint ;
Et plus vous la pouvez accabler d’infamie,
Plus elle vous attaque en mortelle ennemie.

Nicomède. Elle prévient ma plainte, et cherche adroitement
A la faire passer pour un ressentiment ;
Et ce masque trompeur de fausse hardiesse
Nous déguise sa crainte et couvre sa faiblesse.

Laodice. Les mystères de cour souvent sont si cachés,
Que les plus clairvoyants y sont bien empêchés.
Lorsque vous n’étiez point ici pour me défendre,
Je n’avais contre Attale aucun combat à rendre ;
Rome ne songeait point à troubler notre amour.
Bien plus, on ne vous souffre ici que ce seul jour ;
Et dans ce même jour, Rome, en votre présence,
Avec chaleur pour lui presse mon alliance.
Pour moi, je ne vois goutte en ce raisonnement,
Qui n’attend point le temps de votre éloignement,
Et j’ai devant les yeux toujours quelque nuage
Qui m’offusque la vue et m’y jette un ombrage.
Le roi chérit sa femme, il craint Rome ; et pour vous,