Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/215

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Jocaste.

Pourrez-vous me haïr jusqu’à cette rigueur
De souhaiter pour vous même haine en mon cœur ?


Œdipe.

Toujours de vos vertus j’adorerai les charmes,
Pour ne haïr qu’en moi la source de vos larmes.


Jocaste.

Et je me forcerai toujours à vous blâmer,
Pour ne haïr qu’en moi ce qui vous fit m’aimer.
Mais finissons, de grâce, un discours qui me tue :
L’assassin de Laïus doit me blesser la vue ;
Et malgré ce courroux par sa mort allumé,
Je sens qu’Œdipe enfin sera toujours aimé.


Œdipe.

Que fera cet amour ?


Jocaste.

Ce qu’il doit à la haine.


Œdipe.

Qu’osera ce devoir ?


Jocaste.

Croître toujours ma peine.


Œdipe.

Faudra-t-il pour jamais me bannir de vos yeux ?


Jocaste.

Peut-être que demain nous le saurons des dieux.