Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/241

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Les courtisans plus délicats
Firent un indicible cas.
Pour moi je ne puis qu’en liesse
Voir cette incomparable pièce :
J’en ai, pour plaire à mon désir,
Goûté bien des fois le plaisir.
Je suis pourtant toujours avide
De voir cet appareil splendide
Qui peut les sens extasier :
Je n’en saurois rassasier ;
Et quoiqu’au jeu dame Fortune
Ait tari mon fonds de pécune,
Certes je prétends bien encor
Retourner à la Toison d’or,
Dont presque je suis idolâtre,
Et la voir de l’amphithéâtre.

La Gazette[1], qui, à cause de la présence du Roi, parle de cette représentation, fait remarquer que Leurs Majestés étaient « accompagnées d’une grande partie des seigneurs et dames de la cour, qui ne fut jamais si éclatante, ni si pompeuse, notamment depuis que l’on y voit ce beau nombre de chevaliers du Saint-Esprit, que Sa Majesté fit naguère[2]. »

Le 18 février la pièce se jouait encore, car Loret, toujours passionné pour cet ouvrage, s’accusant dans son numéro de ce jour de rester trop enfermé dans son cabinet, s’écrie :

N’aurois-je pas plutôt raison
D’aller à droit, d’aller à gauche,
...........
Pour voir l’illustre Toison d’or[3] ?

« En 1664, dit le Dictionnaire portatif des théâtres, on la

  1. Année 1662, no 6, 14 janvier.
  2. Cette promotion avait été faite, dit l’État de la France, « avec les plus belles cérémonies qui se soient vues pour ce sujet. » On en trouve la description détaillée dans un numéro extraordinaire de la Gazette, daté du 6 janvier 1662, et intitulé : Les cérémonies faites à la réception des chevaliers de l’ordre du Saint-Esprit, le dernier jour de l’année 1661 et les deux suivants, en l’église du grand couvent des Augustins.
  3. Les décorations de la Toison d’or étaient, de l’avis de tous les contemporains, les plus belles qu’on eût encore vues. Chapu-