Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/278

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Pour rendre un long hommage à l’une et l’autre reine, 210
Pour y prendre à jamais les ordres de son roi.
Puissé-je en obtenir, pour mon premier emploi,
Ceux d’aller jusqu’aux bouts de ce vaste hémisphère
Arborer les drapeaux de son généreux frère[1],
D’aller d’un si grand prince, en mille et mille lieux, 215
Égaler le grand nom au nom de ses aïeux,
Le conduire au delà de leurs fameuses traces,
Faire un appui de Mars du favori des Grâces,
Et sous d’autres climats couronner ses hauts faits
Des lauriers qu’en ceux-ci lui dérobe la Paix ! 220

L’Hyménée.

Tu vas voir davantage, et les Dieux, qui m’ordonnent
Qu’attendant tes lauriers mes myrtes le couronnent,
Lui vont donner un prix de toute autre valeur
Que ceux que tu promets avec tant de chaleur.
Cette illustre conquête a pour lui plus de charmes 225
Que celles que tu veux assurer à ses armes ;
Et son œil, éclairé par mon sacré flambeau,
Ne voit point de trophée ou si noble ou si beau.
Ainsi, France, à l’envi l’Espagne et l’Angleterre[2]
Aiment à t’enrichir quand tu finis la guerre 230
Et la paix, qui succède à ses tristes efforts,
Te livre par ma main leurs plus rares trésors.

La Paix.

Allons sans plus tarder mettre ordre à tes spectacles ;
Et pour les commencer par de nouveaux miracles,
Toi que rend tout-puissant ce chef-d’œuvre des cieux, 235

  1. Philippe, frère de Louis XIV, né en 1640, qui avait pris le titre de duc d’Orléans à la mort de Gaston son oncle (2 février 1660).
  2. Ces vers doivent avoir été composés au moment de l’impression. Corneille y fait évidemment allusion au mariage du duc d’Orléans avec Henriette d’Angleterre, sœur de Charles II, lequel avait été rétabli sur le trône en 1660. Ce mariage est du 31 mars 1661, et, comme nous l’avons dit, l’Achevé d’imprimer de la première édition de la Toison d’or est du 10 mai de la même année.