Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/295

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Ne peuvent rien contre les charmes
Que Médée en fureur verse sur la toison :
L’amour seul aujourd’hui peut faire ce miracle ;
Et dragon ni taureaux ne vous feront obstacle, 625
Pourvu qu’elle s’apaise en faveur de Jason.
Prête à descendre en terre afin de l’y réduire,
J’ai pris et le visage et l’habit de sa sœur.
Rien ne vous peut servir si vous n’avez son cœur ;
Et si vous le gagnez, rien ne vous[1] sauroit nuire 630

Pallas.

Pour vous secourir en ces lieux,
Junon change de forme et va descendre en terre ;
Et pour vous protéger Pallas remonte aux cieux,
Où Mars et quelques autres dieux
Vont presser contre vous le maître du tonnerre. 635
Le soleil, de son fils embrassant l’intérêt,
Voudra faire changer l’arrêt
Qui vous laisse espérer la toison demandée ;
Mais quoi qu’il puisse faire, assurez-vous qu’enfin
 L’amour fera votre destin, 640
Et vous donnera tout, s’il vous donne Médée.

(Ici, tout d’un temps, Iris disparoît, Pallas remonte au ciel, et Junon descend en terre, en traversant toutes deux le théâtre, et faisant croiser leurs chars.)

Jason.

Eh bien ! si mes conseils…

Pélée.

Eh bien ! si mes conseils… N’en parlons plus, Jason :
Cet oracle l’emporte, et vous aviez raison.
Aimez, le ciel l’ordonne, et c’est l’unique voie

  1. Toutes les éditions publiées du vivant de Corneille portent ici nous. Nous n’avons pas hésité à y substituer, d’après l’impression de 1692, vous, qui est évidemment la bonne leçon.