Sauve tout le dehors du honteux esclavage
Qui t’enlève tout le dedans[1].
Scène III
L’avez-vous vu, ma sœur, cet amant infidèle ?
Que répond-il aux pleurs d’une reine si belle ?
Souffre-t-il par pitié qu’ils en fassent un roi ?
A-t-il encor le front de vous parler de moi ?
Croit-il qu’un tel exemple ait su si peu m’instruire,
Qu’il lui laisse encor lieu de me pouvoir séduire ?
Modérez ces chaleurs de votre esprit jaloux :
Prenez des sentiments plus justes et plus doux ;
Et sans vous emporter souffrez que je vous die…
Qu’il pense m’acquérir par cette perfidie ?
Et que ce qu’il fait voir de tendresse et d’amour,
Si j’ose l’accepter, m’en garde une à mon tour ?
Un volage, ma sœur, a beau faire et beau dire,
On peut toujours douter pour qui son cœur soupire :
Sa flamme à tous moments peut prendre un autre cours,
Et qui change une fois peut changer tous les jours.
Vous, qui vous préparez à prendre sa défense,
Savez-vous, après tout, s’il m’aime ou s’il m’offense ?
Lisez-vous dans son cœur pour voir ce qui s’y fait,
Et si j’ai de ces feux l’apparence ou l’effet[2] ?