Je n’examine point, après votre menace,
Quelle foule d’amants brigue chez vous ma place.
Cent rois, si vous voulez, vous consacrent leurs vœux ;
Je le crois ; mais aussi je suis roi si je veux ;
Et je n’avance rien touchant le diadème
Dont il faille chercher de témoins que vous-même.
Si par le choix d’un roi vous pouvez me punir,
Je puis vous imiter, je puis vous prévenir ;
Et si je me bannis par là de ma patrie,
Un exil couronné peut faire aimer la vie.
Mille autres en ma place, au lieu de s’alarmer…
Eh bien ! je t’aimerai, s’il ne faut que t’aimer :
Malgré tous ces héros, malgré tous ces monarques,
Qui m’ont de leur amour donné d’illustres marques,
Malgré tout ce qu’ils ont et de cœur et de foi,
Je te préfère à tous, si tu ne veux que moi.
Fais voir, en renonçant à ta chère patrie,
Qu’un exil avec moi peut faire aimer la vie,
Ose prendre à ce prix le nom de mon époux.
Oui, Madame, à ce prix tout exil m’est trop doux ;
Mais je veux être aimé, je veux pouvoir le croire ;
Et vous ne m’aimez pas, si vous n’aimez ma gloire.
L’ordre de mon destin l’attache à la toison :
C’est d’elle que dépend tout l’honneur de Jason.
Ah ! si le ciel l’eût mise au pouvoir d’Hypsipyle,
Que j’en aurois trouvé la conquête facile !
Ma passion pour vous a beau l’abandonner,
Elle m’offre encor tout ce qu’elle peut donner ;
Malgré mon inconstance, elle aime sans réserve.
Et moi, je n’aime point, à moins que je te serve ?
Cherche un autre prétexte à lui rendre ta foi ;