Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/397

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Scène 2


Sertorius, Viriate, Thamire


Sertorius
——————————
Que direz-vous, Madame,
Du dessein téméraire où s’échappe mon âme ?
N’est-ce point oublier ce qu’on vous doit d’honneur,
Que demander à voir le fond de votre cœur ?

Viriate
Il est si peu fermé, que chacun y peut lire,
Seigneur, peut-être plus que je ne puis vous dire :
Pour voir ce qui s’y passe, il ne faut que des yeux.

Sertorius
J’ai besoin toutefois qu’il s’explique un peu mieux.
Tous vos rois à l’envi briguent votre hyménée,
Et comme vos bontés font notre destinée,
Par ces mêmes bontés j’ose vous conjurer,
En faisant ce grand choix, de nous considérer.
Si vous prenez un prince inconstant, infidèle,
Ou qui pour le parti n’ait pas assez de zèle,
Jugez en quel état nous nous verrons réduits,
Si je pourrai longtemps encor ce que je puis,
Si mon bras…

Viriate
——————Vous formez des craintes que j’admire.
J’ai mis tous mes états si bien sous votre empire,
Que quand il me plaira faire choix d’un époux,
Quelque projet qu’il fasse, il dépendra de vous.
Mais pour vous mieux ôter cette frivole crainte,
Choisissez-le vous-même, et parlez-moi sans feinte :
Pour qui de tous ces Rois êtes-vous sans soupçon ?
À qui d’eux pouvez-vous confier ce grand nom ?