Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/428

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J’aime, et peut-être plus qu’on n’a jamais aimé ;
Malgré mon âge et moi, mon cœur s’est enflammé.
J’ai cru pouvoir me vaincre, et toute mon adresse
Dans mes plus grands efforts m’a fait voir ma faiblesse.
Ceux de la politique et ceux de l’amitié
M’ont mis en un état à me faire pitié.
Le souvenir m’en tue, et ma vie incertaine
Dépend d’un peu d’espoir que j’attends de la reine.
Si toutefois…

Thamire
—————Seigneur, elle a de la bonté ;
Mais je vois son esprit fortement irrité ;
Et si vous m’ordonnez de vous parler sans feindre,
Vous pouvez espérer, mais vous avez à craindre.
N’y perdez point de temps, et ne négligez rien ;
C’est peut-être un dessein mal ferme que le sien.
La voici. Profitez des avis qu’on vous donne,
Et gardez bien surtout qu’elle ne m’en soupçonne.


Scène 2


Sertorius, Viriate, Thamire


Viriate
On m’a dit qu’Aristie a manqué son projet,
Et que Pompée échappe à cet illustre objet.
Serait-il vrai, Seigneur ?

Sertorius
———————————Il est trop vrai, Madame ;
Mais bien qu’il l’abandonne, il l’adore dans l’âme,
Et rompra, m’a-t-il dit, la trêve dès demain,
S’il voit qu’elle s’apprête à me donner la main.