Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/538

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Souffrez encore un mot, et je ne parle plus.
1245––Massinisse de soi pourroit fort peu de chose :
Il n’a qu’un camp volant dont le hasard dispose ;
Mais joint à vos Romains, joint aux Carthaginois,
Il met dans la balance un redoutable poids,
Et par ma chute enfin sa fortune enhardie
1250Va traîner après lui toute la Numidie.
Je le hais fortement, mais non pas à l’égal
Des murs que ma perfide eut pour séjour natal.
Le déplaisir de voir que ma ruine en vienne,
Craint qu’ils ne durent trop, s’il faut qu’il les soutienne.
1255Puisse-t-il, ce rival, périr, dès aujourd’hui !
Mais puissé-je les voir trébucher avant lui !
––Prévenez donc, Seigneur, l’appui qu’on leur prépare ;
Vengez-moi de Carthage avant qu’il se déclare ;
Pressez en ma faveur votre propre courroux,
1260Et gardez jusque-là Massinisse pour vous.
Je n’ai plus rien à dire, et vous en laisse faire.

Lélius
Nous saurons profiter d’un avis salutaire.
Allez m’attendre au camp : je vous suivrai de près.
Je dois ici l’oreille à d’autres intérêts ;
Et ceux de Massinisse…

Syphax
1265Et ceux de Massinisse…Il osera vous dire…

Lélius
Ce que vous m’avez dit, Seigneur, vous doit suffire.
Encore un coup, allez, sans vous inquiéter ;
Ce n’est pas devant vous que je dois l’écouter.


Scène II – Lélius, Massinisse, Mézétulle

Massinisse