Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/664

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MARTIAN.

1690Voilà quel est l’effet…Si votre âme enflammée…

PLAUTINE.

Vil esclave, est-ce à toi de troubler ma douleur ?
Est-ce à toi de vouloir adoucir mon malheur,
À toi, de qui l’amour m’ose en offrir un pire ?

MARTIAN.

Il est juste d’abord qu’un si grand cœur soupire ;
1695Mais il est juste aussi de ne pas trop pleurer
Une perte facile et prête à réparer.
Il est temps qu’un sujet à son prince fidèle
Remplisse heureusement la place d’un rebelle :
Un monarque le veut ; un père en est d’accord.
1700Vous devez pour tous deux vous faire un peu d’effort,
Et bannir de ce cœur la honteuse mémoire
D’un amour criminel qui souille votre gloire.

PLAUTINE.

Lâche ! tu ne vaux pas que pour te démentir
Je daigne m’abaisser jusqu’à te repartir.
1705Tais-toi, laisse en repos une âme possédée
D’une plus agréable encor que triste idée :
N’interromps plus mes pleurs.

MARTIAN.

N’interromps plus mes pleurs. Tournez vers moi les yeux :
Après la mort d’Othon, que pouvez-vous de mieux[1] ?

PLAUTINE, cependant que deux soldats entrent et parlent à Atticus à l’oreille[2].

Quelque insolent espoir qu’ait ta folle arrogance,
1710Apprends que j’en saurai punir l’extravagance,
Et percer de ma main ou ton cœur ou le mien,
Plutôt que de souffrir cet infâme lien.

  1. Voltaire fait de ce qui suit la scène vi, avec ces personnages : PLAUTINE, MARTIAN, ATTICUS, deux Soldats.
  2. Dans Voltaire (1764) : et parlent bas à Atticus.