Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/82

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Scène VI.

GARIBALDE.

Quel revers imprévu ! quel éclat de tonnerre
Jette en moins d’un moment tout mon espoir par terre !
1105Ce funeste retour, malgré tout mon projet,
Va rendre Grimoald à son premier objet ;
Et s’il traite ce prince en héros magnanime,
N’ayant plus de tyran, je n’ai plus de victime :
Je n’ai rien à venger, et ne puis le trahir[1],
1110S’il m’ôte les moyens de le faire haïr.
N’importe toutefois, ne perdons pas courage ;
Forçons notre fortune à changer de visage ;
Obstinons Grimoald, par maxime d’État,
À le croire imposteur, ou craindre un attentat ;
1115Accablons son esprit de terreurs chimériques,
Pour lui faire embrasser des conseils tyranniques ;
De son trop de vertu sachons le dégager,
Et perdons Pertharite afin de le venger.
Peut-être qu’Édüige, à regret plus sévère,
1120N’osera l’accepter teint du sang de son frère,
Et que l’effet suivra notre prétention
Du côté de l’amour et de l’ambition.
Tâchons, quoi qu’il en soit, d’en achever l’ouvrage ;
Et pour régner un jour mettons tout en usage.

FIN DU TROISIÈME ACTE.
  1. Var. Je n’ai rien à venger, et ne le puis trahir. (1653-56)