Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/89

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1280Jusqu’à la racheter par une ignominie,
Ou qu’un frivole espoir de te revoir à moi
Me pût rendre perfide et lâche comme toi.
Aime-moi, si tu veux, déloyal ; mais n’espère
Aucun secours de moi pour t’immoler mon frère.
1285Si je te menaçois tantôt de son retour,
Si j’en donnois l’alarme à ton nouvel amour,
C’étoient discours en l’air inventés par ma flamme,
Pour brouiller ton esprit et celui de sa femme.
J’avois peine à te perdre, et parlois au hasard,
1290Pour te perdre du moins quelques moments plus tard ;
Et quand par ce retour il a su nous surprendre,
Le ciel m’a plus rendu que je n’osois attendre.

GRIMOALD.

Madame…

ÉDÜIGE.

Madame…Tu perds temps ; je n’écoute plus rien,
Et j’attends ton arrêt pour résoudre le mien.
1295Agis, si tu le veux, en vainqueur magnanime ;
Agis comme tyran[1], et prends cette victime :
Je suivrai ton exemple, et sur tes actions
Je réglerai ma haine ou mes affections.
Il suffit à présent que je te désabuse,
Pour payer ton amour ou pour punir ta ruse.
1300Adieu.


Scène III.

GRIMOALD, GARIBALDE, UNULPHE.
GRIMOALD.

Adieu.Que veut Unulphe ?

  1. Thomas Corneille (1692) et Voltaire ont ajouté un : « Agis comme un tyran. »