Page:Corneille - Imitation de Jésus-Christ, édition 1862.djvu/408

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sensible pour toi seul, en toi se transformer,
ne se plus servir d’yeux, de langue, ni d’oreilles,
que pour voir, pour chanter, pour ouïr tes merveilles,
et par ces doux transports que tu rends tout-puissants,
passer toute mesure et tout effort des sens,
pour s’unir pleinement aux grandeurs de ton être,
d’une façon qu’à tous tu ne fais pas connoître ?

Je ne fais que gémir, et porte avec douleur,
attendant ce beau jour, l’excès de mon malheur ;
mille sortes de maux dans ce val de misères
troublent incessamment ces élans salutaires,
m’accablent de tristesse et m’offusquent l’esprit,
rompent tous les effets de ce qu’il se prescrit,
le détournent ailleurs, de lui-même le chassent,
sous de fausses beautés l’attirent, l’embarrassent,
et m’ôtant l’accès libre à tes attraits charmants,
m’empêchent de jouir de tes embrassements,
m’empêchent d’en goûter les douceurs infinies,
qu’aux esprits bienheureux jamais tu ne dénies.

Laisse-toi donc toucher, Seigneur, à mes soupirs :
laisse-toi donc toucher, Seigneur, aux déplaisirs
qui de tous les côtés tyrannisant la terre,
en cent et cent façons me déclarent la guerre,