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7^ DISCOURS

Qu'un homme prenne querelle avec un autre, et que l'ayant tué il vienne à le reconnoître pour son père ou pour son frère, et en tombe au désespoir, cela n'a rien que de vraisemblable', et par conséquent on le peut in- venter ; mais d'ailleurs cette circonstance de tuer son père ou son frère sans le connoître, est si extraordi- naire et si éclatante, qu'on a quelque droit de dire que l'histoire n'ose manquer à s'en souvenir, quand elle ar- rive entre des personnes illustres, et de refuser toute croyance à de tels événements, quand elle ne les marque point. Le théâtre ancien ne nous en fournit aucun exemple qx! Œdipe ; et je ne me souviens point d'en avoir vu aucun autre chez nos historiens. Je sais que cet événement sent plus la fable que l'histoire, et que par conséquent il peut y avoir été inventé^, ou en tout, ou en partie ; mais la fable et l'histoire de l'antiquité sont si mêlées ensemble, que pour n'être pas en péril d'en faire un faux discernement, nous leur donnons une égale autorité sur nos théâtres. Il suffit que nous n'inventions pas ce qui de soi n'est point vraisemblable, et qu'étant inventé de longue main, il soit devenu si bien de la con- noissance de l'auditeur, qu'il ne s'effarouche point à le voir sur la scène. Toute la Métamorphose d'Ovide est manifestement d'invention ; on peut en tirer' des sujets de tragédie, mais non pas inventer sur ce modèle, si ce

1. J^c rjue manque dans l'édition de i663, mais c'est évidemment une faute.

2. Var. (édit. de ififio) : « Et je ne me souviens point d'en avoir vu chez nos historiens que celui de Thésée, qui fut reconnu par son père comme il étoit prôt de l'empoisonner. Je sais que l'un et l'autre sentent plus la fable que l'histoire et que par conséquent leur aven- ture peut avoir été inventée. » — Dans les éditions de i663-i683 le passage relatif à Thésée a été transporté un peu plus loin. Voyez p. 77, note I, et p. 123, note a.

3. Var. (édit. de 1660 et de i663): on en peut tirer.

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