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TIRCIS, seul.


En matière d’amour rien n’oblige à tenir,
Et les meilleurs amis, lorsque son feu les presse.
Font bientôt vanité d’oublier leur promesse.


SCÈNE IV.


PHILANDRE, CLORIS.



PHILANDRE.


Je meure, mon souci, tu dois bien me haïr :
Tous mes soins depuis peu ne vont qu’à te trahir.


CLORIS.


Ne m’épouvante point : à ta mine, je pense
Que le pardon suivra de fort près cette offense,
Sitôt que j’aurai su quel est ce mauvais tour.


PHILANDRE.


Sache donc qu’il ne vient sinon de trop d’amour.


CLORIS.


J’eusse osé le gager qu’ainsi par quelque ruse
Ton crime officieux porteroit son excuse 80.


PHILANDRE.


Ton adorable objet, mon unique vainqueur,
Fait naître chaque jour tant de feux en mon cœur,
Que leur excès m’accable, et que pour m’en défaire
J’y cherche des défauts qui puissent me déplaire 81.
J’examine ton teint dont l’éclat me surprit,
Les traits de ton visage, et ceux de ton esprit ;
Mais je n’en puis trouver un seul qui ne me charme 82.


80. Var. [Ton crime officieux porteroit son excuse ;]
Mais n’importe, sachons. phil. Ton bel œil mon vainqueur. (1633-57)

81. Var. Je recherche par où tu me pourras déplaire. (1633-57)

82. Var. Mais je n’en puis trouver un seul qui ne me plaise.
clor. Et moi dans mes défauts encor suis-je bien aise
Qu’ainsi tes sens trompés te forcent désormais
À chérir ta Cloris et ne changer jamais. (1633-57)