Page:Corneille - Marty-Laveaux 1910 tome 2.djvu/83

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Soyez-les de ma honte ; et vous fondant en larmes,
Punissez-vous, mes yeux, d’avoir trop présumé
Du pouvoir de vos charmes.

De quoi vous a servi d’avoir su me flatter,
D’avoir pris le parti d’un ingrat qui me trompe,
S’il ne fit le constant qu’afin de me quitter
Avecque plus de pompe ?

Quand je m’en veux défaire, il est parfait amant ;
Quand je veux le garder, il n’en fait plus de compte ;
Et n’ayant pu le perdre avec contentement,
Je le perds avec honte.

Ce que j’eus lors de joie augmente mon regret ;
Par là mon désespoir davantage se pique.
Quand je le crus constant, mon plaisir fut secret,
Et ma honte est publique.

Le traître avait senti qu’alors me négliger
C’était à Dorimant livrer toute mon âme ;
Et la constance plut à cet esprit léger
Pour amortir ma flamme.

Autant que j’eus de peine à l’éteindre en naissant,
Autant m’en faudra-t-il à la faire renaître :
De peur qu’a cet amour d’être encore impuissant,
Il n’ose plus paraître.