De son dernier soupir puisse lui faire hommage.
Seigneur, considérez…
Quel désordre peut craindre un cœur désespéré ?
N’y consent-elle pas ?
Oui, seigneur, mais…
N’importe.
Cette vive douleur en deviendra plus forte.
Et ce n’est pas un mal que je veuille guérir ;
Je ne veux que la voir, soupirer, et mourir.
Vous vous échapperez sans doute en sa présence ;
Un amant qui perd tout n’a plus de complaisance :
Dans un tel entretien il suit sa passion,
Et ne pousse qu’injure et qu’imprécation.
Juge autrement de moi : mon respect dure encore ;
Tout violent qu’il est, mon désespoir l’adore.
Quels reproches aussi peuvent m’être permis ?
De quoi puis-je accuser qui ne m’a rien promis ?
Elle n’est point parjure, elle n’est point légère ;
Son devoir m’a trahi, mon malheur, et son père.
Mais son devoir fut juste, et son père eut raison ;
J’impute à mon malheur toute la trahison ;
Un peu moins de fortune, et plus tôt arrivée,
Eût gagné l’un par l’autre[1], et me l’eût conservée ;
Trop heureux, mais trop tard, je n’ai pu l’acquérir :
Laisse-la moi donc voir, soupirer, et mourir.
Oui, je vais l’assurer qu’en ce malheur extrême
- ↑ L’un par l’autre ne se rapporte à rien : on devine seulement qu’il eût gagné Félix par Pauline. (Voltaire)