Page:Corneille - Pulcherie, Luynes, 1673.djvu/16

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Je pense le connaître à l'égal de moi-même ;
Mais croyez-moi, seigneur, et l'empire est à vous.

'LÉON' — Ma sœur !

'IRÈNE' — Oui, vous l'aurez malgré lui, malgré tous.

'LÉON' — N'y perdons aucun temps : hâtez-vous de m'instruire ;
Hâtez-vous de m'ouvrir la route à m'y conduire ;
Et si votre bonheur peut dépendre du mien...

'IRÈNE' — Apprenez le secret de ne hasarder rien.
N'agissez point pour vous ; il s'en offre trop d'autres
De qui les actions brillent plus que les vôtres,
Que leurs emplois plus hauts ont mis en plus d'éclat,
Et qui, s'il faut tout dire, ont plus servi l'état :
Vous les passez peut-être en grandeur de courage ;
Mais il vous a manqué l'occasion et l'âge ;
Vous n'avez commandé que sous des généraux,
Et n'êtes pas encor du poids de vos rivaux.
Proposez la princesse ; elle a des avantages
Que vous verrez sur l'heure unir tous les suffrages :
Tant qu'a vécu son frère, elle a régné pour lui ;
Ses ordres de l'empire ont été tout l'appui ;
On vit depuis quinze ans sous son obéissance :
Faites qu'on la maintienne en sa toute-puissance,
Qu'à ce prix le sénat lui demande un époux ;
Son choix tombera-t-il sur un autre que vous ?
Voudroit-elle de vous une action plus belle
Qu'un respect amoureux qui veut tenir tout d'elle ?
L'amour en deviendra plus fort qu'auparavant,
Et vous vous servirez vous-même en la servant.

'LÉON'