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ACTE III, SCENE VI 127

Et ne nous rendez point tout à fait malheureuses.

LE VIEIL HORACE.

Sabine, votre coeur se console aisément ;

Nos malheurs jusqu'ici vous touchent faiblement.

Vous n'avez point encor de part à nos misères :

Le ciel vous a sauvé votre époux et vos frôres ; 1040

Si nous sommes sujets, c'est de votre pays.

Vos frères sont vainqueurs quand nous sommes trahis,

Et, voyant le haut point où leur gloire se monte,

Vous regardez fort peu ce qui nous vient de honte.

Mais votre trop d'amour pour cet infâme époux 1045

Vous donnera bientôt à plaindre comme à nous.

Vos pleurs en sa faveur sont de faibles défenses ;

J'atteste des grands dieux les suprêmes puissances

Qu'avant ce jour fini ces mains, ces propres mains,

Laveront dans son sang la honte des Romains. 1050

SABINE.

Suivons-le promptement, la colère l'emporte. Dieux! verrons-nous toujours des malheurs de la sorte? Nous faudra-t-il toujours en craindre de plus grands, Et toujours redouter la main de nos parents?

1043. 5e monter ne se dirait plus aujourd'liui comme s'élève, s'accroît, s'agrandit.

A miii? mes vanités jusque-là ne se montrent. (Suivante, m, 8.)

1045. Corneille prend substantivement trop en beaucoup d'autres passages : il dit: « mon trop de malheurs... son trop de vertu... » {Pertharite, 1026, 1117) etc.

1046. A plaindre, à vous plaindre, à gémir ; il semble qu'il manque un com- plément ; mais il y a des exemples de cette construction, aujourd'hui incorrecte, mais non jugée telle par Garnier, Malherbe et Corneille:

O nouveau sujet de pleurer et de plaindre. (Médée, 1310.)

1049. Avant ce jour fini, tour heureux et vif, latinisme familier au

tvn* siècle. Corneille dit de même: «après son sang répandu après mon

père mort après les Maures défaits [Cid, 644, 1208, 1523), après un sceptre

acquis... après tant d'ennemis abattus. (Cinna, 480, 1247.) La tournure est plus rare avec a»ant. Avant que, et après qun sont beaucoup plus lourds.

1052. Des malheurs de la sorte, de tels malheurs ; un peu faible.

1054. « Ce derniers vers est de la plus grande beauté: non seulement il dit ce dont il s'agit mais il prépare ce qui doit suivre. » (Voltaire.)

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