Page:Corneille Théâtre Hémon tome2.djvu/27

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INTRODUCTION '{1

du père, maîlre et justicier, ne se laisse guère entrevoir, dans le récit de Tite-Live, que vers la fin, alors que le vieil Horace déclare juste le meurtre de Camille et proteste qu'il l'eût ven- gée lui-même sur son ills, si elle n'eût pas été coupable. Ciioz Cor neille, a u conU:air,e. elle est au prejîîier plan ; le (ragiquç,_ Tr aiiçai s a Trouva' ni03"i'n d'êlre ici plus Romain que Tite-Live.^

  • Si l'on va au fond di- rh'i.-e?. d si IVin .'•itiiîp le cinquiénic

acte, la part de l'imilalion si- trouve considéiablement réduite. 11 y a plus : par sa simplicité même, le texte de Tite-Live semble devoir être une gêne plutôt qu'un secours pour un auteur dramatique, et l'on ne voit pas bien tout d'abord com- ment il en pourra tirer la matière de cinq actes, comment il pourra soutenir si longtemps Tintérêt d'une action dont un récit doit être l'âme. Corneille accepte le récit; mais il n'a garde de lui laisser la forme d'une narration bistorique : il l'accommode au théâtre, le coupe, en prolonge l'intérêt qu'il suspend, en double l'effet par une admirable péripétie. De même, pour la peinture des caractères, il s'empare des don- néesdetile-Live, mais les complète et y découvre des ressources imprévues. C'est lui-même qui l'observe : « Les oppositions de» sentiments de la nature aux emportements de la passion ou à la sévérité du devoir forment de puissantes agitations, qui sont reçues de l'auditoire avec plaisir... Horace et Curiace ne seraient point à plaindre s'ils n'étaient point amis et beaux-frères'. » Voilà le grand ressort qui fait mouvoir l'action tout entière. Si le caractère de Sabine prête à la critique, combien dramatique est la situation que crée ce nouveau per- sonnage! et combien l'union déjà réalisée entre les deux familles est plus émouvante que l'union projetée de l'histoire! Par suite, le caractère du jeune Horace est mieux mis en lumière : il n'est plus seulement le Romain, le citoyen, le soldat farouche, ferox jitvenis, que Rome domine et écrase un peu, dont on nous montre la valeur sur le champ de bataille, la cruauté, insulfisamment expliquée, après la victoire. Comme on nous Ta fait voir de plus près, entouré des siens, qui s'opposent à lui et rehaussent encore son sauvage héroïsme, nous sonmies mieux préparés, non sans doute à justifier, mais à comprendre son fratricide.

En un* mot, Tite-Live ne nous montre que la patrie; près de la patrie. Corneille nous montre la famille, source d'émo- tions non moins profondes. C'est ce qui a fait dire à M. Géruzez : et Horace est sans doute la production la plus vigoureuse, la pl'js originale du génie de Corneille. • Là, tout est substance,

1. Diicours de la tragédie.

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