Page:Corneille Théâtre Hémon tome2.djvu/282

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

98 CINNA

Que vous allez souiller d'une tache trop noire, 410

Si vous ouvrez votre âme à ces impressions Jusques à condamner toutes vos actions.

On ne renonce point aux grandeurs légitimes; On garde sans remords ce qu'on acquiert sans crimes, Et, plus le bien qu'on quitte est noble, grand, exquis, 413 Plus qui l'ose quitter le juge mal acquis. N'imprimez pas. Seigneur, cette honteuse marque A ces rares vertus qui vous ont fait monarque; Vous l'êtes justement, et c'est sans attentat Que vous avez cliangé la forme de l'Etat. 420

Rome est dessous vos lois par le droit de la guerre. Qui sous les lois de Rome a mis toute la terre; Vos armes l'ont conquise, et tous les conquérants, Pour être usurpateurs, ne sont pas des tyrans. Quand ils ont sous leurs lois asservi des provinces, 425

Gouvernant justement, ils s'en font justes princes : C'est ce que fit César; il vous faut aujourd'hui Condamner sa mémoire, ou faire comme lui. Si le pouvoir suprême est blâmé par Auguste, César fut un tjran et son trépas fut juste, 430

Et vous devez aux dieux compte de tout le sang Dont vous l'avez vengé pour monter à son rang.

«11. YoT. Si, TOUR laissant sédnire à ces impressions.

Vous-même condamnez tontes vos actions. (1643-ES.)

412. Sur jusques, voyez la note du v. 1539.

416. il y a quelque vague et peut-être quelque embarras dans ce début de la «■démonstration, peu convaincue et peu convaincante, de Ciana. Il veut dire qu'Au- guste, en abandonnant le pouvoir, reconnaîtrait, par là même, qu'il est mal acquis, et semblerait renier le passé d"Ortave.

417. Marque, nota, Q-trissure; imprimer une marque est un pur latinisme 421. C'est ce que démontre longuement Méf-ène dans Dion Cassius (LU, 18).—

Dessous est ici préposition. Vaugelas, dit M. Marty-Laveaux, ne 1 admet que comme adverbe; dans ses derniers ouvrages, Corneille l'emploie rarement dan» ,'acception condamnée ; mais il ne corrige que deux fois les vers de ses pre- mières pièces pour se conformer à la nouvelle règle ; l'une de ces deux correc- tions porte sur le v. 531 de Cinna.

424. Si nous en croyons M. Desjardins (Corneille historien), ces vers font ail* sion « à l'attachement que César a inspiré à ses légions pour sa personne et pour sa famille ». L'allusion, en ce cas, serait bien enveloppée. Pourquoi voir, dans le plaidoyer de Cinna. autre chose qu'un plaidoyer acco nmodé à la situation et au caractère de celui qui parle ? Le grand Corneillu, avant d'être un bisturien, est un avocat ; il plaidera le pour et le contre ave" une éloquence également per- suasive. — Pour être, parce qu'ils sont, tournure vive qu'on retrouvera au T. 990.

425. Var. Lorsque notre yaleor nons gagne nne province, '

Gouvernant justement, on devient juste prince. (1643-66.)

Province, royaume, Etat, voyez la note du v. 1253.

432. Dont, par lequel; Voltaire blâme à tort » l-îur familier à Corneille, e( <|u'on a déjà rencontré au v. 56 ,

�� �