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INTRODUCTION 23

temps que d'adiniralion et de pitié. Le deuxième acte semble un composé de Polynicte et de l'Impromptu de Versail'es. Ce même Genest, qui donne des leçons de goût au décorateur et de sincérité à une actrice coquette, va, peu d'instants après, être frappé d'un coup de la grâce ; une voix d'en haut va lui crier, alors qu'il jouera le rôle du martyr Adrien :

Poursuis, Genest, ton personnage : Tu n'imiteras point eu vain i.

Pénétrés d'un profond sentiment religieux, les actes II et III s'achèvent pourtant par une double visite de la cour aux comédiens : du palais de Maximin ou de Dioclélien nous sommes transportés sur la scène de l'hôtel de Roiir^ogne, où les petits marquis, trop empressés autour des aclrices, trou- blent l'ordre de la représentation. Quelle situation plus pathé- tique que celle du quatrième acte, alor:\ que Genest, las de parler paur un autre, découvre ses vrais sentiments? Quelle plus ferme et plus lière déclaration d'une foi persécutée, qui brave en face ses persécuteurs?

Je ne craius point la mort qui conduit à la vie 2.

Dioctétien s'irrite, les comédiens, dont Genest est l'unique soutien, se désespèrent } mais, au milieu de leur terreur et de leui's larmes, voici que luit tout à coup un sourire. On les interroge : avec une « franchise ingénue » ils répondent : amoureuses et matamores, traîtres et pédants, louchants et risibles à la fois dans leur etTarement, tous sont là, depuis l'acteur qui joue « parfois les rois et parfois les esclaves >> jusqu'à celui qui, modestement, représente « les assistants ». Genest n'en est pas moins conduit au supplice ; lui qui jouait autrefois les martyrs, il est martyr à son tour, mais de son sang versé d'autres martyrs surgiront. Lui-même, Dioclétieu, est contraint d'avouer son mipuissance :

Je vois du saug d'un seul naître des légions'.

S'il est vrai que Polyeucte et Saint Genest soient « les deux seules tragédies sacrées qui puissent passer, avec toutes les différences, pour des échantillons et des abrégés perfectionnés du genre des mystères * » on ne comprend guère que Boileau ait écrit :

^. Saint Genest, II, 2. S. Ibid., IV, 6.

3. Ibid., V, 4. _ i

4. Sainte-Beuve, Port-Royal, l, 7. Mais Saiole Beuve, dans l'analfse qu'j

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