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ACTE I, SCÈNE III Ï7

STRA.TONICE.

A raconter ses maux souvent on les soulage.

PAULINE,

Écoute ; mais il faut te dire davantage,

Et que, pour mieux comprendre un si triste discours,

Tu saches ma faiblesse et mes autres amours :

£ne femme d'honneur peut avouer sans honte 165

Ces surprises des sens que la raison surmonte ;

Ce n'est qu'en ces assauts qu'éclate la vertu,

Et l'on doute d'un cœur qui n'a point combattu.

Dans Rome, où je naquis, ce malheureux visage D'un chevalier romain captiva le courage; 170

11 s'appelait Sévère ^excuse les soupirs Qu'arrache encore un nom trop cher à mes désirs.

STRATONICE.

Est-ce lui qui naguère aux dépens de sa vie

Sauva des ennemis votre empereur Décie,

Qui leur tira mourant la victoire des mains, 175

Et fit tourner le sort des Perses aux Romains ?

Lui, qu'entre tant de morts immolés à son maître,

On ne put rencontrer, ou du moins reconnaître ;

��161.^, suivi de l'infinitif, pour en suivi du participe présent, tournure plus légère, familière aux contemporains de Corneille :

A vaincre sans péri!, on triomphe sans gloire. [Cid, 434.)

162. Voyez dans l'Examen de la pièce ce que dit Corneille de la coiifidence faite par Pauline à Stratonice.

168. Dans Vlmitation (I, l.S) Corneille reproduira cevers presque textuellement :

Et l'on doute d'un cœur jusqu'à ce qu'il combatte.

« Pauline n'est pas une femme insensible, et ce n'est pas sa froideur qui fait sa vertu. Elle a tous les penchants que d'autres prennent pour des lois, toutes les émotions que les autres prennent pour des avertissements et des règles. Seulement eimme du temps de Corneille, on n'avait pas encore changé le mal en bien, ces g irprises des sens s'appellent des tentations et des périls, au lieu de s'appolei di's inspirations de la conscience. » (Saint-Mahg Gibardin, Cours de littératuri dramatique, IV, 66.)

IrtP. Ce malheureux visage, expression qui n'est point « burlesque a, comme le dit Ir p sévèrement Voltaire, mais qui appartient, elle aussi, au langage convenu de la galanterie. Voyez la note du v. 87.

170. M. Marty-Laveaux remarque que chevalier est ici le terme juste, mais que cavalier tendait à s'y substiluer de plus en plus ; dans le Cid. par exemple Corneille remplace partout chevalier par cavalier. Dans X'Examen même de .Polyeticle, il écrit : « Polyeucte et Néarque étaient deux cavaliers étruitemei lunis d'amitié. »— Captiver se disait souvent des séductions de l'amour, et p.nfn même captif avait le sens d'amant. Quant à courage, on sait que chez tous 1«| poètes du XVII' siècle il équivaut à cœur.

173. Leur tira, leur arracha :

U leur faudrait da front tirer le diadème. {Nicamède, 1663.)

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