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INTRODUCTIOB! 39

çonne pas l'amour, et c'est Philiste qu'elle entretient, sans le savoir, du haut de sa fenêtre. Mais l'ingénieux Cliton (moins naïf et plus utile à son mailre que celui du Menteur) feint d'être attaqué par des malfaiteurs, et ses cris écartent Philiste, qui laisse la place libre à Dorante. Les amants s'expliquent; le fâcheux revient, trop tard, et, après son départ, Cliton, qu'un plâtras a arrêté dans sa course, raconte à son maître son stratagème.

ACTE V. — Sorti de prison, Dorante accepte l'hospitalité que lui offre Cléandre, et qui le rapproche de Mélisse. Cliton s'y sent déjà chez lui, et courtise la suivante, avec une galan- terie, il est vrai, peu raffinée :

J'ai le goût fort grossier eu matière de flamme.

Le contraste est complet entre la grossièreté du valet et la délicatesse exagérée du maître. Dorante est un raffiné d'hon- neur : délivré par Philiste, — ■ du moins il le prétend, mais ne doit-il pas plutôt la liberté aux témoins qui ont déposé en sa faveur? — il veut sacrifier à Philiste sa passion et celle de Mélisse. D'où vient ce revirement soudain? C'est que Phi- liste, dans son ignorance de ce qui se passe, a confié son se- cret à son rival et l'a prié de parler pour lui à celle qu'ils aiment tous deux. Il suffit : l'amour doit s'effacer devant l'amitié. En vain cette rupture le désespère; en vain Mélisse se répand en supplications. Il faut que Philiste lui-même in- tervienne pour le dégager de ce devoir imaginaire. L'inter- vention de Philiste est, il est vrai, déterminée par les francs aveux de Mélisse ; encore se fait-elle attendre et s'enveloppe- t-elle de subtilités allégoriques. On sait que Corneille et les poètes de son temps aimaient les vers qui se répètent en forme de refrain ; mais comment ne pas juger étrange ce re- frain qui revient par trois fois dans la bouche de l'insignifiant Philiste :

Rentrez dans la prison dont vous vouliez sortir?

Et comment ne pas sourire, lorsque Philiste donne le mot de l'énigme :

On nomme une prison le nœud de l'hyménée?

En vérité. Mélisse et Dorante sont excusables de n'avoir pas compris d'abord. Cette lutte de délicatesse entre Dorante, l'amant aimé, et Philiste, l'amant sacrifié, n'est que médio- crement plaisante à la fin d'une comédie. Les deux rivaux s'y

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