INTRODUCTION
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Corneille a eu ses commentateurs; il a même eu ses détracteurs : une des plus belles épigrammes de Lebrun * ridiculise à jamais l'un d'eux :
Ce petit homme, à son petit compas, Veut, sans pudeur, asservir le génie ; Au bas du Pinde, il trotte à petits pas Et croit franchir les sommets d'Aonie. Au grand Corneille il a fait avanie ; Mais, à vrai dire, on riait aux éclats De voir ce nain mesurer un Atlas, El, redoublant ses efforts de pygmée, Burlesqiiement roidir ses petits bras Pour étouffer si haute renommée.
Nous n'oserions pas appliquer cette épigrarame à Voltaire. La société moderne lui doit trop pour ne pas le respecter, même en ses faiblesses. Il a l'intelligence très étendue, le goût très fin, et semble réunir les qualités les plus éminentes du critique; mais il y a des choses qu'il ne peut comprendre - : s'il les comprenait, il ne serait plus Voltaire. Cet esprit d'une prodigieuse activité, qui a l'ambition de tout embrasser, mais qui ne réussit pas en tout également, juge tout d'après lui-même et condamne tout ce qui s'écarte de ses idées sys- tématiques. « Il retourne et déguise en prose, dit Sainte- Beuve, ces phrases altières et sonores qui vont si bien à l'allure des héros, et il se demande si c'est là écrire et parler /"rançais. Il appelle grossièrement solécisme ce qu'il devrait qua-
1. Épigrammes, livre 1.
2. il Je ne comprends même pas, quant à mol, dit M. Havet, que dans les éditions de «Corneille on condamne le vieux poète à traîner à son pied, pour iiinsi dire, le Commentaire de Voltaire tout entier. » [Études sur les pensées de Pascal, en têlede l'édition Delagrave.) Couverts par l'autorité, universelle- ment reconnue, de M. Havet, nous avons supprimé ou tout au moins abrégé une [larlie des Remarques sur Rodogune; mais nous n'avons pas cru devoir les faire enlioremenl disparaître. N'est-il pas curieux, après tout, de voir comment Voltaire a jugé Cornoille et de saisir sur le fait la différence des deux génies?
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