Page:Corneille Théâtre Hémon tome3.djvu/392

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Lescritiqnp« ne sont pas seuls dans l'embarras; un passage curieux de^ Jéinoires de M"* Clairon* nous montre les actrices mê:iie chargées de jouer le rôle de Rodogune en désaccord sur la façon de l'interpréter.

« M"« Gaussin avait k plus belle tôte, le son de voix le plus touchant possible ; son ensemble était noble, tous ses mouve- menis avaient une grâce enfantine, à laquelle il était impossible de résister; mais elle était .M'* Gaussin dans tout.... Rodoguno demandant à ses amants la tête de leur mère est assurément une feiTirae très altière, très décidée. Il est vrai que Corneille a placé dans ce rôle quatre vers d'un genre plus pastoral que tragique :

Il est des nœuds secrets, il est des sympathies, - Dont par le doux rapport les âmes assorties S'attachent l'une à l'autre, et se laissent piquer Par ce je ne sais quoi qu'on ne peut expliquer*.

Rodogune aime, et l'actrice, sans se ressouvenir que l'expres- sion du sentiment se modifie d'après le caractère, et non d'après les mots, disait ces vers avec une grâce, une naïveté volup- tueuse, plus faite, suivant moi, pour Lucinde dans l'Oracle • que pour Rodogune. Le public, routine à cette manière, atten- dait ce couplet avec impatience et l'applaudissait avec transport. Quelque danger que je craignisse en m'éloignant de cette route, j'eus le coarage de ne pas me mentir à moi-même. Je dis ces vers avec le dépit d'une femme fière, qui se voit contrainte" d'avouer qu*elle est sensible. Je n'eus pas un dégoût, mais je D*eus pas un coup de main. J'eus le plus grand succès dans le reste du rôle; et, suivant ma coutume, je vins, entre les deux pièces, écouter aux portes du foyer les critiques qu'on pouvait faire. J'entendis M. Duclos, de l'Académie française, dire, avec son ton de voix élevé et positif, que la tragédie avait été bien

1. Pages 92-95 : Antciott nur Rodogune; l'édition Ré-ni r en a cité une partie; j'ai rétabli 1m demiôres lignes, puce qu'il y est util mention de Vol> taire.

%. Acte I. se. V.

8. VUraele, comédie en un acte, en prose, du Rennais Saint-Poix (1740) es' resté au répertoire; ce n'est d'ailleurs qu'un mariTandage précieux. Amour«ul d'une JQime fiUe élerée depuis sa naissance dans le royaume de Péerie, loin de tout mortel, '\n prince doit, soirant la loi fatale d'un oracle, se fitire aimei d'elle, en paraissant muet, tourd et insensible. La princesse, qui le croit privé de raison, lu fait répéter, comme à un perroqoet, de fort tendres chansons, et finit par l'aicMT; le charme est donc rompu. On Toit que M'>' Clairoc a raison •t que nous sommes bien loin de Corneille.

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