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284 NICOMÈDE

La gloire est plus solide après la calomnie, Et brille d'autant mieux qu'elle s'en vit ternie. Mais voici Nicoraède, et je veux qu'aujourd'hui.

��SCENE II. PRUSIAS, ARSINOÉ, NICOMÈDE, ARASPE, GARDES.

ARSINOÉ.

Grâce, grâce. Seigneur! à notre unique appui î 1150

Grâce à tant de lauriers en sa main si fertiles! Grâce à ce conquérant, à ce preneur de villes! Grâce...

NICOMÈDE.

De quoi. Madame? est-ce d'avoir conquis Trois sceptres que ma perte expose à votre fils?

��H50. Voltaire ne semble pas bien comprendre le sens de la prière perfide d'Arsinoé. 11 y voit une ironie. Assurément, Arsinoé joue ici la romédie de la gé- nérosité, et tout autre qus Prusias peut-être ne s'y laisserait pas tromper. Mais enfin elle joue à merveille ce rôle d'ennemie magnanime, et Nicomède seul ne prend pas au sérieux ces éloges hypocrites, qui sont autant d'insinuations habi- lement calculées, ce plaidoyer apparent, qui se tourne en réquisitoire, et, sous prétexte de désarmer Prusias, exaspère son ressentiment.

1152. 'i On n'a jamais dit en poésie un preneur de villes, comme l'on dit en prose un preneur de tabac et de mouchoirs. » (Lekain.) En vertu de cet arrêt, Lekain substitue aux vers de Corneille deux vers de sa façon :

Grâce à ce conquérant dont les lauriers fertiles Ont rangé sous vos lois ce grand nombre de villes.

La Fontaine a pourtant écrit :

Louis lui-même, effroi de tant de prince=. Preneur de murs, subjugueur de province?.

Ce mot. d'ailleurs, dans la bouche d'Arsinoé, prend une valeur particulière. II ne lui échappe point : c'est un trait perfide qui doit pénétrer fort avant dans l'âme du jaloux Prusias.

1153. « Nicomède ne doit pas répondre sur le même ton, et ne fait que répé- ter qu'il a pris des villes. » (Voltaire.) Nicomède ne répond pas sur le même ton, puisque la prière d'Arsinoé, nous venons de le montrer, n'est pas une pure ironie, u II raconte ses exploits, dit M. Naudet, mais de maniera à faire soupçonner l'am- bition de cette ennemie acharnée à sa perte, si Prusias pouvait ouvrir les yeux. D'ailleurs, Nicomède ne professe pas iii l'art de l'avocat. Le poète l'a fait répon- dre comme il le devait selon son caractère, avec véhémence, avec hauteur, plu- totqu'aveccirconspection, avec une douceur insinuante. » Cela dit, on peut avouer que Nicomède parle bien souvent de ces trois sceptres conquis par lui. Ce souve- nir, glorieux pour lui, mais gênant pour Prusias, ne devrait-il pas être rappelé avec plus de discrétion?

1154. Expose, livre. Si Nicomède, en effet, est sacrifié, c'est aux maint d'Attale que ga perte fera tomber les trois royaumes conquis par lui.

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