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556 ÉTUDE

tarie ; mais on s'étonnera plus peut-être de voir Corneille, au len- demain de Tite et Bérénice (où il avait échoué précisément, du moins ou le disait, par ?on inaptitude à peindre la passion tendre), accepter de traiter un sujet qui ne lui semblait guère plus favo- rable, un sujet qu'Apulée, dans ses Métamorphoses, avait traité en conte des Mille et une nuits, que Benserade avait déjà mis à la scène (1656) sous la forme d'un ballet dansé au Louvre par le roi lui-même, dont La Fontaine enfin venait de tirer un poème exquis (1669). Ce mythe à la fois gracieux et profond, où se mêlent les plus graves questions qui touchent à l'âme, à la vie, à la mort, mais qui nous apparaît toujours sous la forme idéale de la svelte Psyché aux ailes de papillon, les mains un peu affaiblies du poète à' Attila u'allaient-elles pas le laisser s'enfuir? ou n'allaient-elles pas, en essayant de saisir l'insaisissable, froisser le mystérieux symbole, si délicat? L'auteur àWmphitryon, qui triomphait dans le vers libre, n'avait rien de pareil à craindre ; mais la seule tragédie que Corneille eût écrite en vers libres était Agésilas.

Il réussit pourtant, et si bien que c'est à peine si l'on distingue ses vers de ceux de Molière a un tour peut-être un peu plus lyrique et tragique çà et là. Un éditeur de Molière, Bret, a même écrit : » Le principal honneur de cette tragédie-ballet dut appartenir à Corneille, et Molière était assez grand pour n'en être point ja- loux'. » Un autre éditeur de Molière, plus moderne et plus savant, M. Mesnard, dit de même : « Corneille savait varier sa manière d'écrire. II avait, malgré la forte originalité de son génie, une souplesse dont il a donné bien des preuves 2. » H nous semble que ces éloges seront facilement justifiés par une lecture rapide des actes de Psyché où Corneille a le droit de revendiquer la part es- sentielle.

Le premier acte, qui est de Molière, est un acte d'exposition. On nous y peint agréablement la jalousie des sœurs de Psyché, dont la beauté victorieuse les éclipse. Soudain l'oracle commande au roi, leur père, de ne point songera marier Psyché, mais de la con- duire au sommet d'un mont, où elle doit attendre la veuue d'un monstre affreux, le seul époux que lui réservent les Dieux. Les sœurs envieuses triomphent.

Acte II. — Psyché a dit adieu à son père; elle congédie douce-

1. Edition de Molière, 1773.

S. Éd. d« Molière, coll. des Grandi Écrivain».

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