Lorsque le Tout-Puissant, bien ou mal à propos,
Sortant un jour de son repos,
Visita la nuit éternelle,
Il était porté sur mon aile ;
Et tandis que sa main posait les fondements
De la machine immense,
Mes chants, unis à dix mille instruments,
De la nuit incréée écartaient le silence.
Vous ne me nommez pas, et l’énigme vous fuit.
Eh bien lisez donc ce qui suit.
Jeune homme, arrête, et souffre qu’un moment
Je demeure où j’ai pris naissance…
Mais il ne m’entend pas. L’homme est capricieux :
Tous les jours son impatience,
Pour une courte jouissance,
Détruit de l’avenir l’espoir délicieux.
Bientôt, hélas ! sa main légère
M’a séparée d’avec mon père,
Et va m’attacher au lacet
Qui serre le joli corset
De sa jeune et tendre bergère.
Là, si mon règne fut charmant,
Il fut bien court : presque avant que de naître,
Je mourus où le jeune amant
Se mourait, lui, de ne pas être.
Ainsi l’homme, jouet de sa folle pensée,
Court après le plaisir, n’atteint que la douleur
Sous son vêtement déguisée,
Et dans son ardeur insensée,
Perd le fruit pour cueillir la fleur.
Y êtes-vous enfin ? — Non. — La chose est étrange !
Et vous avez de l’esprit comme un ange !
Et votre bourse est pleine d’or !
M’entendez-vous ? — Non, pas encor.
Mais j’ai tout dit. — Il est vrai, c’est …
En effet, or et ange font orange. Quant à mon immortelle charade, le mot en est maîtresse.
— Le 17 du mois dernier il s’est tenu chez Mme Necker, une assemblée de dix-sept vénérables philosophes, dans laquelle, après avoir dûment invoqué le Saint-Esprit, copieusement dîné,