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les voies de l’amour

n’y as pas goûté beaucoup ; ton verre est encore plein ; c’est vrai qu’il est capiteux en diable ! »

« Comment, rétorque Jean, vous ne vous souvenez déjà plus de l’époque de nos gamineries, quand nous nous croyions tout permis parce que nous étions étudiants en médecine. Ce jour-là, vous étiez avec moi à la grille de la palissade du Château Ramesay. Trois jeunes filles passent de l’autre côté de la rue. Nous cadençons nos pas au bruit de leurs talons qui chantent sur le trottoir en pierre : gauche, droite. Et nous de répéter en frappant très fort du talon de nos gros souliers : gauche, droite, et les trois jeunes filles tout étonnées, tout abasourdies, de piétiner sur place : gauche, droite. Elles n’avancent pas d’une semelle, et nous continuons : gauche, droite. Un groupe d’étudiants sort de l’Université qui entonne le refrain « À la Bisaillon ». Nous emboîtons le pas derrière ces autres gamins, oubliant les jeunes filles qui en profitent pour se sauver dans une autre direction.

« Ah ! je suffoque », s’écrie, d’une voix lamentable, Pierre Vinet qui porte la main à sa gorge. On s’effare ; on se demande si quelqu’un n’a pas de la trinitrine, de l’huile camphrée, de la spartéine. Michel Toinon est déjà debout ; il court à sa pharmacie. « Mais, non ; mais, non, s’écrie de nouveau Pierre Vinet ; je ne suis pas malade je n’ai pas d’angine de poitrine. C’est encore ce damné