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les premières années

M. Laboulaye, rapporteur des lois complémentaires, ne cachait pas les emprunts faits à la monarchie. Il reconnaissait qu’on attribuait à la République « les garanties de la monarchie constitutionnelle, telle que nous l’avons pratiquée pendant plus de trente ans », et il ajoutait : « Si parmi les républicains il en est qui trouvent qu’on aurait dû aller plus loin, ils feront bien de considérer que la France, après avoir traversé l’Empire, a besoin de reprendre l’habitude d’un gouvernement constitutionnel. Acclimater chez nous la liberté politique est une œuvre délicate et qui demande beaucoup de ménagements. » Tel n’était pas l’avis de M. Louis Blanc, qui s’en allait, dans les réunions publiques, « proclamer les droits de l’absolu », ni de M. Naquet, qui exprimait aux électeurs d’Arles, de Marseille et de Toulon, les craintes que lui inspiraient les transactions constitutionnelles récemment consenties.

L’attention générale se concentrait déjà[1] sur les élections qui approchaient. Malgré l’intervention de Gambetta, favorable au scrutin de liste, on avait établi le scrutin d’arrondissement. L’Assemblée, tout d’abord, fit choix de soixante-quinze sénateurs inamovibles. Une entente entre

  1. À part la discussion sur la liberté de l’enseignement supérieur, qui se termina par l’institution de jurys mixtes pour la collation des grades universitaires (voir les discours remarquables prononcés par Jules Ferry, les 11 et 12 juin 1875), la session fut verbeuse et vide. On invalida M. de Bourgoing, quatorze mois après son élection ; l’enquête avait révélé des menées bonapartistes d’un caractère inquiétant. Les symptômes d’apaisement, par ailleurs, se multiplièrent dans le pays. Le maréchal continuait de circuler en France, répondant d’une façon familière et heureuse aux discours qu’on lui adressait. Le cardinal Donnet, les généraux Lebrun et Ducrot firent entendre des paroles de paix, et à Arcachon, M. Thiers donna la formule du jour : « La République est votée, dit-il ; il n’y a plus qu’une chose : la faire réussir. »