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mémoires olympiques

cago ! Je revoyais en 1889, assis derrière leurs bureaux, Pullman, le milliardaire-philanthrope à la carrière si représentative de l’Amérique d’alors, puis ce même docteur Harper m’expliquant avec une froide emphase que la supériorité de son université provenait du fait « qu’elle fonctionnait comme une compagnie de chemins de fer ». Mais à cette vision première de la cité des abattoirs, enfumée, bruyante, s’en superposait une autre, éblouissante celle-là. En face de la grandeur et de la réelle beauté de la « World’s Fair » de 1893, je m’étais senti pénétré d’admiration pour la montée brusque d’une pareille sève.

L’idée de tenir les Jeux à Chicago me plaisait. Et déjà les journaux américains commençaient d’en parler avec faveur lorsqu’une lettre fulminante de James E. Sullivan fut publiée. Il y était dit que la question n’était aucunement réglée, vu que le Comité Olympique et son président avaient été débarqués au profit d’une « union internationale », récemment fondée à Paris ; et il citait parmi les « fondateurs » : le comte Brunetta d’Usseaux pour l’Italie, le professeur Bergh-Petré pour la Suède, MM. G. de Saint-Clair et Pierre Roy pour la France et lui-même pour les États-Unis. Brunetta, qui se montrait chaque jour plus zélé envers le C.I.O. et le professeur Bergh, n’attendirent pas un instant pour donner un cinglant démenti à cette nouvelle. Pierre Roy se décida à en faire autant. Sullivan, après une première lettre aigre, en écrivit le 21 mars 1901 une seconde où se trouvaient ces mots qui l’honorent : « I am always willing, if I think I have made a mistake, to acknowledge it. » Il n’avait pas du reste que des amis au-delà des mers. Dès la fin de 1900, le Morning Telegraph avait déclaré que « tout cela était une campagne contre Chicago », concluant