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mémoires olympiques

donnait à l’Italie « un si efficace témoignage de cordiale sympathie ».

Peu après, nos collègues Gebhardt et Kemény s’embarquèrent pour les États-Unis, porteurs de nos meilleurs messages pour les organisateurs des Jeux : messages discrets. Tandis qu’il venait de s’affirmer avec l’Europe, le C.I.O. avait intérêt à ne pas attirer l’attention sur sa carence en Amérique. Les points essentiels indiqués plus haut étaient acquis. Il eût été imprudent d’en réclamer davantage. « Savoir attendre » demeurait notre mot d’ordre.

Aussi bien ces Jeux de Saint-Louis manquaient-ils d’attrait. Je n’avais, personnellement, aucune envie d’y assister. Je gardais rancune à cette ville des désillusions que m’avait causées la vue du confluent du Missouri et du Mississippi qui la situe sur la carte. Fenimore Cooper aidant, que n’avais-je pas attendu, jadis, d’un paysage où se rencontrent ces fleuves aux noms étranges et sonores ! Aucune beauté, aucune originalité. Je pressentais que l’Olympiade serait assortie à la ville. En fait d’originalité, le programme n’en offrait qu’une et plutôt gênante. C’étaient les deux jours dénommés bizarrement « anthropological days » et dont les concours étaient réservés aux nègres, aux Indiens, aux Philippins, aux Aïnos, auxquels on osa adjoindre en plus des Turcs et des Syriens. Il y a de cela vingt-six ans !… Direz-vous que le monde n’a pas marché depuis lors et que l’idée sportive n’a pas progressé ?…