Page:Coudriet, Chatelet - Histoire de Jonvelle et de ses environs, 1864.djvu/115

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

L’ambition des vassaux de la couronne prenant chaque jour plus d’accroissement, bientôt leur pouvoir est sans bornes et le faible sans appui contre leur oppression. La féodalité n’a plus de frein : c’est une anarchie qui corrompt et bouleverse tout. Chacun s’arroge le droit de guerre ; le seigneur s’arme contre le seigneur, les villes contre les villes, une abbaye contre une abbaye ; l’esprit d’indépendance est général ; la royauté elle-même n’est plus qu’un vain titre, une magistrature impuissante. C’est dans cette période des dixième et onzième siècles, appelés justement siècles de fer et de barbarie, que fut pratiquée l’oppression des classes ouvrières et indigentes et même des menus propriétaires, par la caste des seigneurs féodaux. Ils firent de leurs vilains de véritables esclaves[1], attachés à la glèbe, ne s’appartenant pas plus que ceux des Grecs et des Romains, et sur lesquels ils avaient fait prévaloir, comme un droit coutumier, tous les genres de vexations, d’arbitraire et de despotisme. Qu’on en juge par les lettres d’affranchissement données aux treizième, quatorzième et quinzième siècles : malgré les droits étranges qu’elles conservaient aux seigneurs, elles furent cependant bénies par les sujets, comme un bienfait signalé et comme une heureuse émancipation. Sous quelle oppression gémissaient-ils donc auparavant ? Mais cet esprit cupide et tyrannique avait reçu sa principale influence des maximes

  1. On distinguait deux sortes de serfs : 1° l’homme de mainmorte ou mainmortable qui était attaché à la glèbe, c’est-à-dire serf de corps et de biens ; l’homme de poosté, homo potestati dont la servitude se réduisait à payer certains droits ou à faire certaines corvées. (Velly, Hist. de France, III, sous l’an 1187 ; Perreciot, État civil, I, 391.)